samedi 27 juillet 2013

Compostelle



Toujours intriguée par ce qui pousse à entamer ce fameux pèlerinage, j'ai entrepris la lecture du livre de Jean-Christophe Rufin, attirée par tout ce succès et un peu inquiète de ce que j'avais entendu ci et là sur ce livre.
Et c'est là que l'on mesure le travail d'écrivain : certes, nous avons droit à toutes les difficultés et soucis matériels rencontrés sur la route, mais la lente transformation du pèlerin s'effectue sous nos yeux. J'ai ainsi mieux compris ce que tout ce chemin apportait d'abandon et d'épurement. 
Il nous dit d'abord le dépouillement, la fatigue et l'usure de l'âme au fil des premières semaines. Puis il nous dit qu'on se révolte, on voudrait penser et on est pris par les nécessités de la vie. Mais lorsqu'on dépasse ces désirs, il se produit un travail de dépouillement qui prépare à l'approfondissement spirituel. On se retrouve en situation d'aller plus loin dans la sensibilité spirituelle. Chacun vit cette étape à sa façon. Le chemin en lui-même ne dit rien de Dieu.




Jean-Christophe Rufin parle peu de ce chemin spirituel très personnel mais il en parle très bien :
"Et là, dans ces splendeurs, le Chemin m'a confié son secret. Il m'a glissé sa vérité qui est aussitôt devenue la mienne. Compostelle n'est pas un pèlerinage chrétien mais bien plus, ou bien moins selon la manière dont on accueille cette révélation. Il n'appartient en propre à aucun culte, et, à vrai dire, on peut y mettre tout ce que l'on souhaite. S'il devait être proche d'une religion, ce serait la moins religieuse d'entre elles, celle qui ne dit rien de Dieu mais permet à l'être humain d'en approcher l'existence : Compostelle est un pèlerinage bouddhiste. Il délivre des tourments de la pensée et du désir, il ôte toute vanité de l'esprit et toute souffrance du corps, il efface la rigide enveloppe qui entoure les choses et les sépare de notre conscience ; il met le moi en résonance avec la nature. Comme toute initiation, elle pénètre dans l'esprit par le corps et il est difficile de la faire partager à ceux qui n'ont pas fait cette expérience."
Voici un autre passage qui nous en dit un peu plus :
"Le marcheur est, selon la formule de Victor Hugo, un géant nain. Il se sent au comble de l'humilité et au faîte de sa puissance. Dans l'état d'aboulie où l'ont plongé ces semaines d'errance, dans cette âme délivrée du désir et de l'attente, dans ce corps qui a limé ses souffrances et dompté ses impatiences, dans cet espace ouvert, saturé de beautés, à la fois interminable et fini, le pèlerin est prêt à voir surgir quelque chose de plus grand que lui, de plus grand que tout, en vérité. Cette longue étape d'altitude fut, en tout cas pour moi, le moment, sinon d'apercevoir Dieu du moins de sentir son souffle."




Tout le récit tourne autour des rencontres et des nécessités, il n'empêche que ces deux moments du livre laissent entrevoir les sommets que peut atteindre ce long chemin. Il me semble avoir saisi là une parcelle de ce qui entraîne tous ces pèlerins vers Saint-Jacques.




Et je pense en écrivant ce billet à tous ceux dont le chemin s'est arrêté dans un train à Compostelle ainsi qu'à leurs familles.  

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